Quelques explications sur ce plan, par Serge Smulevic
Les latrines : étaient composées de planches dans lesquelles étaient simplement percés des trous. On était assis les uns à côtés des autres et il fallait faire très attention de ne pas tomber, car derrière nous et en-dessous de nous c’était le vide rempli de m… Il arrivait que des Capos, en rigolant, poussaient l’un ou l’autre pour s’amuser. Il y avait la place pour environ une soixantaine de personnes dans ce local.
Dans la salle des lavabos, qui était très grande, il y avait, si mes souvenirs sont bons, quelques douches rudimentaires. Mais ce local, dès la rentrée du travail, avant, mais surtout après la distribution de la soupe, servait de lieu de rencontre pour tous ceux qui avaient quelque chose à échanger ou à trafiquer. Toutes les transactions se faisaient là, c’est pour celà qu’on l’appelait « la Bourse » .
Le Block n° 24 était réservé aux déportés qui étaient atteints de la gale. Ils y étaient soignés et y séjournaient jusqu’à ce qu’ils soient guéris . Quelques uns avaient demandé à y rester et avaient obtenus l’autorisation, comme moi. Le chef de ce Block, Walter Marx, un ancien de Bùchenwald, homme déjà assez âgé , et qui avait même été interné à Dachau, bien avant, est resté chef de ce Block jusu’au 18 janvier 1945, date à laquelle il a fait la marche de la mort, à nos côtés.
Le Bordel, qui a été supprimé vers juin ou juillet 1944, était bien entendu isolé des autres Blocks par des grillages en barbelés. Seuls y avaient accès, pour faire ce qu’ils avaient à y faire ( et ils faisaient « la queue »…) les déportés non-juifs, et qui avaient suffisamment de « praemienschein » c’est à dire de « bons de prime » d’une certaine valeur ( que je ne connais pas ).
L’endroit indiqué « potences » était réservé aux pendaisons. Les SS pouvaient y dresser jusqu’à cinq potences pour y exécuter les pendaisons ( sort réservé aux déportés qui avaient fait une tentative d’évasion et avaient été repris ). Les pendaisons avaient toujours lieu après l’appel du soir, et avant la distribution de la soupe. Après les pendaisons nous devions obligatoirement défiler devant les pendus.
« écritures » ou en allemand « Schreibstùbbe » était un bureau où travaillaient plusieurs déportés connaissant bien les langues, et où avaient lieu toutes les inscriptions relatives au travail, aux changements d’un commando pour un autre, d’un Block vers un autre, etc, bref tout ce qui concernait les questions administratives, ainsi que l’enregistrement des noms des nouveaux déportés qui étaient mis en quarantaine.
L’estrade « Orchestre » était assez grande pour pouvoir contenir dix à douze musiciens et il y avait un piano au fond l’estrade, qui était recouverte pour les jours de mauvais temps.
Juste devant cette estrade s’en trouvait une autre, également recouverte, sur laquelle se tenaient les officiers SS du camp, ainsi que le Chef du camp ( Lagerältester ) et le chef des Capos. C’est à partir de cet endroit que les déportés étaient comptés en sortant du camp pour aller travailler à l’usine. Une fois le matin et une fois le soir. A cet effet ils sortaient, alignés par cinq, au pas cadencé, et au son des marches militaires que jouait l’orchestre.
Le Capo du commando en tête de son commando, marchant devant et à gauche, annonçait à haute voix, le numéro de son commando et le nombre de déportés qui le composait.
Il y avait un espace vert, réservé à une immense tente qui était édifiée lors d’un « arrivage » Et où l’on mettait les nouveaux arrivés en quarantaine pour dux ou trois jours. Le temps d’être désinfectés, tatoués et inscrits à la « Schreibstùbbe ».
Le lieu appelé pompeusement « Piscine » était en fait un bassin contenant une réserve d’eau. Les SS y ont toutefois fait nager le champion du monde natation de l’époque, Nakache, juif nord africain.
Le document qui suit est controversé.
Il s’agit d’une photo aérienne prise le 14 janvier 1945 et annotée de façon très maladroite par les Américains.
Les Américains accolent au nom d’Auschwitz III celui de Buna qui était une usine IG-Farben, alors que le camp et l’usine sont nettement distincts. Serge Smulevic, rescapé d’Auschwitz III Monowitz, indique qu’il y avait au moins trois kilomètres de marche entre le camp et l’usine. De plus, une autre étiquette indique les limites du camp avec le nom de « BUNA ». Là encore, il s’agit d’une grossière erreur. Le camp n’est pas l’usine !
Serge Smulevic reconnait dans cette photo certains éléments : la forme du camp, l’allée centrale, les blocks qui se font face deux à deux, avec deux entrées dans chaque blocks (visibles sur la photo par les chemins dans la neige). Mais il différe sur un autre point : il voit la place d’appel beaucoup plus grande, comme il l’a indiqué sur son plan. Cette différence le fait douter de l’identification de ce camp comme étant celui où il a vécu.
Les maisons situées en haut de la photo seraient celles de très petit village de Monowitz.