Commentaire par Serge Smulevic, rescapé d’Auschwitz.
Serge Smulevic est depuis quelques mois dans le camp d’Auschwitz-Monowitz,
quand sont déportés des enfants.
Lors de l’arrivée des Juifs hongrois en mars et avril 1944, il y avait vraiment de très
Serge Smulevic – par e-mail, juin 2002.
nombreux enfants parmi eux et ceux qui étaient âgés de 5 à 9 ans ont été dirigés sur Monowitz où nous avons commencé à les voir circuler dans le camp. Ils ne sortaient jamais travailler en commando. La plupart des chefs de block non-juifs les utilisèrent comme « pipel » c’est-à-dire comme garçons de courses et toutes sortes de besognes « ménagères » diverses et légères et aussi à d’autres fins que l’on peut deviner. Ces enfants étaient très bien alimentés, sur alimentés même, certains qui avaient encore leur père dans le camp en profitaient pour leur porter à manger.
Ces enfants-là n’ont jamais souffert de la faim.
Les « blockältester » leur avaient même fait faire de jolis costumes (rayés bien sûr) sur mesure. On voit d’ailleurs sur la photo de la page sur la libération d’Auschwitz, intitulée « Un groupe d’enfants juste après la libération d’Auschwitz » que ces enfants sont gros et gras et qu’ils n’ont donc jamais souffert de la faim, et tant mieux.
Il me paraissait intéressant de le dire, parce que cette photo d’enfants, bien dodus, pourrait en choquer certains, mais il faut connaître la raison de l’état de ces enfants qui ont quand même beaucoup souffert. Il n’y a pratiquement pas eu de victimes parmi ces enfants, alors que paradoxalement, dans d’autres convois, les enfants de cet âge avaient directement été exterminés, ce qui conforte l’idée de la façon imprévisible dont
les Allemands se sont comportés.
Pourquoi ont-ils épargné ces enfants-là ? On ne le saura jamais. Mais ce qui est intéressant à dire, c’est que parmi ces enfants, certains sont restés assez enfants
tout en ayant mûri très rapidement, mais d’autres ont attrapé la grosse tête et affichaient une forme de dédain vis-à-vis des déportés adultes. On ne leur en n’a jamais voulu pour cela, car on pouvait les comprendre, mais le fait est là. Encore une prouesse de la part des Allemands….
Voir aussi :