Sandrine Mendizabal, collégienne à Saint-Jean-de-Luz (64500), m’a demandé, il y a déjà quelques temps, « Qu’est-ce que la race aryenne ? »
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La soi-disant « race aryenne »
Je dirais la « soi-disant race aryenne », car c’est une invention qui date de la fin du XIXème siècle et qu’on repris les nazis. Aujourd’hui, les scientifiques disent qu’il n’y a qu’une race : la race humaine. Et les dernières découvertes concernant le décryptage du génome humain montrent que les êtres humains sont semblables, à de toutes petites différences individuelles près, qui ne dépendant pas de la couleur de la peau, par exemple.
Soyons concrets, Sandrine : si demain tu as absolument besoin d’une transfusion sanguine, ce ne sera pas forcément ton frère ou ta soeur dont tu es pourtant si proche qui pourra te donner le sang qui est compatible avec le sien : les frères et soeurs peuvent avoir des groupes sanguins incompatibles ! C’est peut-être un immigré arrivé récemment en France qui aura le sang qui te sauvera la vie.
De même, pour les greffes, on sait maintenant que la compatibilité des organes ne dépend pas de la couleur de la peau, ni évidemment de la religion des parents… mais des groupes HLA. Un Asiatique, un Juif, un Musulman, un Marseillais ou un Breton, ou un Indien d’Amérique peuvent avoir des organes compatibles, alors que peut-être ceux de tes propres parents ne le sont pas…
Mais Hitler avait besoin, pour unir les Allemands derrière lui, pour permettre sa politique d’exclusion des Juifs, de croire qu’il existait une « race supérieure ». Il prétendait qu’elle venait des Aryens, un peuple qui s’était établi au IIIème millénaire avant JC, sur les hauts plateaux de l’Iran. Vers 1500 av. JC, ces peuplades pénétrèrent le Pendjab et se donnèrent le nom de « ârya » ce qui veut dire « excellent » ou « noble » dans la langue sanscrite. Vers 1860, un scientifique, Max Müller proposa d’appeler « Aryens » ces peuplades qui plus tard, pénétrèrent en Europe. Les Indiens, les Grecs, les Romains, les Celtes, les Germains descendraient de ce peuple et seraient donc des « Aryens ».
Cette théorie est tout à fait fantaisiste, et même si cela était vrai, les Allemands n’étaient pas uniquement les descendants des Aryens : pendant plus de 3000 ans, les mélanges de peuples, les guerres, les déplacements de population font que les Allemands ne constituent absolument pas une « race pure ». Les Juifs non plus d’ailleurs ne sont pas une race : il y a des juifs à la peau noir en Afrique et en Inde ; les Juifs de Russie ont plutôt les cheveux blonds tandis que ceux d’Afrique du Nord sont bruns… !
Maintenant, nous pouvons examiner un peu les théories fumeuses des nazis et les conséquences que cela a eu.
« La race aryenne nordique est la détentrice de toute culture, la vraie représentante de toute l’humanité, et c’est par application divine que le peuple allemand doit maintenir sa pureté raciale. La race germanique est supérieure à toutes les autres et la lutte contre l’étranger, contre le Juif, contre le Slave, contre les races inférieures est sainte. »
Adolf Hitler, Mein Kampf
Ces théories racistes absurdes ont naturellement conduit aux pires crimes : l’extermination des Juifs et des Tsiganes. Cela a conduit aussi à l’extermination des malades mentaux et des handicapés qui « souillaient la race ». Mais cela a mené également à une tentative d’organiser les naissances en sélectionnant les parents comme on sélectionne du bétail : c’est la tragédie des Lebensborn.
Les Lebensborn
Définition :
Le mot « Lebensborn » est formé à partir du mot « Leben« , vie et du mot moyenâgeux « Born » qui veut dire source. On peut traduite par « fontaines de vie«
On appelle « Lebensborn » des maternités crées par les nazis pour y « produire » des enfants qui soient de « race aryenne pure ».
Il serait plus juste de les appeler « haras humains »
L’idée des nazis est de sélectionner et d’accoupler les parents en choisissant :
- un S.S. grand, blond, aux yeux bleus, représentatif de l’idéal de la « race aryenne »,
- une femme allemande, blonde, solide
Hommes de la S.S.
1. Sur ordre du Führer, vous avez été, en tant que dernier fils de votre famille, retirés du front. Cette mesure a été prise dans l’intérêt du peuple et de l’Etat afin que votre famille ne s’éteigne pas.
2. Les hommes de la S.S. n’ont pas pour habitude d’accepter le destin tel qu’il se présente et de ne rien faire pour le transformer. Votre devoir est donc de faire en sorte, et aussi vite que possible, que vous ne soyez plus le dernier fils par la procréation et la naissance d’enfants de bon sang.
3 Ayez pour objectif d’assurer d’ici une année la lignée de vos aïeux et de votre famille afin que vous puissiez à nouveau être disponible pour le combat en première ligne.
Heinrich Himmler.
Une fois l’accouplement fait, comme pour des animaux, le père s’en va, la mère accouche au bout de neuf mois, mais l’enfant lui sera enlevé (elle n’est là que comme femelle reproductrice) pour être confié à une maison d’éducation nazie où Hitler espère former l’élite de la « race aryenne ».
Les enfants élevés dans ces conditions, sans l’amour de leurs parents, vivront un véritable drame. On n’élève pas des enfants comme on élève du bétail !
Après la guerre, ces enfants de personne auront du mal à faire leur vie. Le IIIème Reich s’est écroulé, Hitler est mort, mais les enfants allemands nés dans les Lebensborn devront chercher toute leur vie qui ils sont.
Dans les enfants victimes des Lebensborn, il y a aussi des enfants enlevés à leurs parents, en Tchécoslovaquie, en Pologne, en Yougaslavie, en URSS. Ils étaient sélectionnés par les S.S. pour leurs caractères physiques « racialement valables » et élevés dans des lieux particuliers pour les « germaniser ». Ils furent plusieurs dizaines de milliers d’enfants peut-être, dans ce cas.
Un taux de suicide particulièrement élevé marquera cette génération qui devait, selon les théories nazies, devenir l’élite de la « race aryenne nordique »
Une plaisanterie pour terminer cette page tout de même assez triste ! Pendant la guerre, certains Français disaient que les Allemands étaient des « bons Aryens » (bons à rien) et faisaient partie de la « race des saigneurs » (avec une petite faute d’orthographe volontaire : seigneurs/saigneurs).
Bibliographie : Marc Hillel, Au nom de la race, Fayard, 1975